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Caution avertie ne vaut pas caution informée

Contrairement à celles dont accouche parfois la jurisprudence, les obligations d’information, multiples mais finalement peu variées, que la loi met à la charge du créancier en matière de cautionnement ne sont guère malléables. Quand l’obligation d’information jurisprudentielle est ainsi sensible à la qualité de la caution, l’obligation légale ne fait guère de sentiment et s’applique froidement. Rendu par la Chambre commerciale de la Cour de cassation le 27 novembre 2007, l’arrêt ci-dessous – bientôt en ligne sur Légisfrance (v. annexe) - en atteste.

Une personne physique avait conclu un cautionnement solidaire au profit d’une banque, afin de garantir divers concours d’une société dont elle était par ailleurs dirigeante. La société fut mise en liquidation et la banque assigna la caution en paiement. Cette dernière fit valoir que le créancier ne l’avait pas informée de la défaillance du débiteur principal, malgré les prescriptions de l’article 47 de la loi du 11 février 1994. A quoi, on l’imagine, le créancier répondit qu’en tant que dirigeant d’une société en liquidation, la caution connaissait mieux que quiconque la situation de l’entreprise. Cette réponse satisfit les juges du fond : leur arrêt est censuré par la Cour de cassation  sous le visa de l’article 47 II, alinéa 3, de la loi du 11 février 1994, dans sa rédaction issue de la loi du 29 juillet 1998.

Selon la Cour régulatrice,  «  l’obligation d’information prévue par l’article 47 II, alinéa 3, de la loi du 11 février 1994, dans sa rédaction issue de la loi du 29 juillet 1998, qui impose à tout  créancier d’aviser la caution de la défaillance du débiteur principal dès le premier incident de paiement, non régularisé dans le mois de l’exigibilité de ce paiement, doit être respectée même lorsque le cautionnement a été souscrit par un dirigeant de la société cautionnée en connaissant exactement la situation ».

Cette solution avait déjà été admise, quoique plus discrètement, à propos de l’obligation d’information de l’article L.313-22 du Code monétaire et financier (Cass. Com. 25 mars 2003, n°00-16.472). Cette protection est-elle excessive ? Certainement pas : l’arrêt rendu est sévère, sans doute, mais il est juste. La décision des juges du fond aboutissait en effet à ajouter une condition à l’article 47 de la loi de 1994 : le texte n’impose guère que la caution ne soit pas avertie de l’information qu’on lui délivre. Une telle exigence risquerait d’ailleurs de gonfler inutilement le contentieux : nul doute que les débats rebondiraient sur la connaissance réelle de la caution à chaque fois qu’il serait question d’obligation d’information. Pareilles querelles seraient d’autant plus stériles qu’elles porteraient sur une preuve psychologique quasi-impossible à rapporter…

C’est précisément cette systématicité de l’obligation légale qui la distingue des obligations d’information que la jurisprudence met à la charge des parties. Autant une obligation d’information jurisprudentielle et générale pesant sur tous contractants serait excessive, autant une obligation d’information légale à géométrie variable serait inefficace…

 

ANNEXE

 

COUR DE CASSATION

 

 

Audience publique du 27 novembre 2007

 

Pourvoi n° T 06‑15.128

 

Arrêt n°1287 F-P+B

 

 

 

Attendu, selon l’arrêt déféré, que par actes des 13 et 19 février 1998 et 30 octobre 1998, M. X s’est rendu caution solidaire envers la caisse Y (la caisse) de divers concours consentis, d’une part, à la société A, d’autre part, à la société B, devenue la société C, dont il était le dirigeant ; qu’à la suite de la mise en redressement puis liquidation judiciaires de ces sociétés, la caisse, après avoir déclaré ses créances, a assigné en paiement M. X qui s’est opposé à cette demande et a invoqué un manquement du prêteur à ses obligations ;

 

 

   Sur le premier moyen :

 

 

Attendu que ce moyen ne serait pas de nature à permettre l’admission du pourvoi ;

 

 

Mais sur le second moyen :

 

 

   Vu l’article 47 II, alinéa 3, de la loi du 11 février 1994, dans sa rédaction issue de la loi du 29 juillet 1998 ;

 

 

Attendu que pour condamner M. X, l'arrêt retient que n'est pas fondé le reproche fait à la caisse de ne pas avoir informé la caution de la défaillance du débiteur principal en application de l’article 47 de la loi du 11 février 1994, que M. X connaissait mieux que quiconque la situation de l’entreprise et n’ignorait rien des sommes dont elle était débitrice ;

 

 

Attendu qu’en statuant ainsi, alors que l’obligation d’information prévue par l’article 47 II, alinéa 3, de la loi du 11 février 1994, dans sa rédaction issue de la loi du 29 juillet 1998, qui impose à tout  créancier d’aviser la caution de la défaillance du débiteur principal dès le premier incident de paiement, non régularisé dans le mois de l’exigibilité de ce paiement, doit être respectée même lorsque le cautionnement a été souscrit par un dirigeant de la société cautionnée en connaissant exactement la situation, la cour d’appel a violé, par refus d’application, le texte susvisé ;

 

 

PAR CES MOTIFS :

 

 

CASSE ET ANNULE...

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